La difficile définition de Lean

La question la plus basique à propos de Lean est probablement quelle est sa définition ? Or   définir le Lean de manière synthétique et non ambiguë est un exercice difficile.

  • Trop synthétique, la définition est réductrice et potentiellement sujette à malentendus et/ou à interprétations fallacieuses.
  • Trop explicite et elle risque de manquer de concision et donc être difficile à mémoriser et à restituer.

Lean Management, le livre

Dans mon livre Lean Management, la définition de Lean n’est proposée qu’à la page 90, soit après les premiers 20% du livre. C’est un parti-pris pédagogique qui privilégie l’énumération des différents principes, au travers d’exemples concrets, avant de tenter de résumer le Lean en une définition synthétique. La définition que je propose est la suivante :

Lean est un « système » visant à générer la Valeur Ajoutée maximale au moindre coût et au plus vite, ceci en employant les ressources juste nécessaires pour fournir aux clients ce qui fait de la valeur à leurs yeux.

C’est une définition relativement concise et explicite, qui mérite d’être analysée et commentée en détail si nécessaire, pour bien faire comprendre la richesse qu’elle recèle.

Une définition alternative proposée dans le même ouvrage est :

Le Lean est une approche systémique pour concevoir et améliorer les processus en visant un état idéal centré sur la satisfaction du client, par l’implication de l’ensemble des personnels dont les initiatives sont alignées par des pratiques et principes communs.

Ces deux définitions se réfèrent à un système, qui est un ensemble d’éléments en interaction dynamique. Ce système poursuit une finalité : la satisfaction des clients (et plus largement des parties prenantes), afin d’assurer une prospérité durable à l’entreprise.

Si les clients sont systématiquement mis au cœur des préoccupations, c’est parce qu’ils injectent de l’argent frais. Cette injection ne fonctionne que si les autres parties prenantes contribuent, notamment les employés par la qualité de leur travail, leurs suggestions et capacités d’innovation.

Le système est coordonné, organisé selon un certain nombre de principes ou règles et soutenu par une riche boite à outils et méthodologies.

Proposition 3 :

Le Lean n’est pas simplement d’une collection d’outils ou de techniques mais une méthode globale de management et un cadre de référence qui permet de maintenir l’entreprise sous tension créative.

Par système ou systémique, il faut également comprendre « un tout ». Le Lean s’applique partout, par tous, intégralement. S’il est possible de n’appliquer que certains préceptes et outils et que de manière localisée avec un certain succès, l’efficience maximale ne pourra toutefois n’être atteinte que si l’implémentation est globale, intégrale et complète.

Lean c’est la chasse aux gaspillages

Si l’éradication des gaspillages existants et l’évitement de gaspillages futurs sont une obsession en matière de Lean, résumer celui-ci à la seule chasse aux gaspillages est très réducteur. D’ailleurs « gaspillage » est un terme générique qui dans le contexte doit se comprendre comme un synonyme de dysfonctionnements ou encore de problèmes (Lean Management, page 94).

Lean est trop souvent réduit à cette définition qui irrite les promoteurs du « vrai » Lean. En effet, la chasse aux gaspillages est perçue comme la réduction des coûts, une mesure destinée tantôt à améliorer (ponctuellement) des résultats tantôt à alléger les structures, sans pour autant remettre en question les causes qui sont à l’origine des résultats médiocres ou des structures trop riches.

La chasse aux gaspillages peut apparaître comme un « divertissement » utile et temporaire, une espèce de solution de secours tel un régime après un relâchement de la discipline diététique. Or dans l’un et l’autre cas on sait que le remède est illusoire car aucune cause profonde n’est remise en cause.

Ces mesures court-termistes contredisent en outre un fondement du Lean qui est de de viser l’atteinte d’un état idéal à long terme par des efforts constants et continus.

Le « vrai » Lean cherche à exploiter les leviers de croissance et non pas à réduire dépenses et ressources dans une recherche maladive de « maigreur », d’anorexie. Ainsi, le raisonnement par l’absurde montre qu’une organisation est infiniment Lean lorsqu’elle cesse toute activité, car alors elle ne consommera plus aucune ressource.

Les pièges de la concision

Les initiés entre eux peuvent se contenter de définitions très concises, car ils savent ce qui se cache derrière. C’est un peu comme pour un familier du métro parisien, voir la première page du plan replié évoque l’ensemble du réseau dont il a suffisamment de repères en tête pour que l’évocation « plan du métro » fasse du sens.

Evidemment il en est tout autre pour quelqu’un qui ne connait pas le métro et qui ne peut deviner la richesse du réseau sur la seule représentation de la première page. Pour lui, déplier le plan est nécessaire à sa compréhension.

Ainsi la définition  faire plus avec moins  est parlante pour les initiés, mais cette formulation minimaliste peut se révéler ambiguë et source de malentendu pour ceux qui reçoivent ce message la première fois.

On conçoit que sous la forme brute, pour celles et ceux qui seront exposés aux conséquences de la mise en œuvre du Lean, le message n’est pas forcément compris, ne se présente pas de manière positive ni attractive. Retranscrit dans un langage plus opérationnel,  faire plus avec moins se comprend bien souvent comme travailler plus, plus vite avec moins de temps et moins de moyens.

Si la formulation condensée est parfaitement exacte, elle mériterait d’être énoncée sous sa forme complète :  Produire davantage de valeur ajoutée en gaspillant moins de ressources.

En voulant donner une définition synthétique ayant vocation à servir de mnémotechnique, ramener le Lean à cette expression dépouillée est extrêmement réducteur et terriblement ambiguë.

Il serait plus correct de dire « faire au plus juste »,  ce qui signifie  :

  • Produire bon du premier coup, sans pertes ni gaspillages,
  • Supprimer l’inutile,
  • Veiller au rendement des matières et des énergies, afin de ne pas en gaspiller,
  • Veiller à la productivité main d’œuvre et à la productivité des machines et des équipements, qui sont toutes des ressources précieuses, à capacité limité.

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A propos de l'auteur, Christian HOHMANN

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