Des demi-mesures suffisent-elles à satisfaire les clients ?

Suite à une réservation dans l’un de ses établissements, le groupe hôtelier m’envoie quelques jours avant le séjour un mail récapitulatif, en m’appelant par mon prénom – ce que je déteste de la part de gens que je ne connais pas – et m’invitant à préparer mon séjour. Intéressante initiative.

Tout mon dossier est récapitulé dans le mail, les détails de mon séjour, mes coordonnées via n°client, etc. Je n’en demandais pas tant, mais cela peut se révéler pratique. L’adresse de l’hôtel est rappelé ainsi que les prévisions météo qui couvrent la durée du séjour. Bien.

Pour être agréable à ses clients, dont MOI en particulier puisque le message (et son ton) est très personnalisé, le groupe hôtelier en partenariat avec un prestataire, propose de réserver MES tickets pour les attractions et tours guidés durant MON séjour. Intéressant.

Je suis le lien pour en savoir plus et là grosse déception ; la page d’accueil m’invite à remplir les champs de saisie tant pour la destination et les dates d’arrivée et de départ, que pourtant le mail rappelait avec force détails.

Voilà comment en cherchant à m’être agréable (l’expérience ne se veut-elle pas personnalisée avec force rappel de détails de MON dossier ?) elle devient générique, impersonnelle, inintéressante, voire irritante puisque après avoir suggéré une offre en rapport avec MON séjour, cela revient à faire faire au client, de manière peu élégante, une recherche de base comme sur n’importe quel moteur de recherche ou site spécialisé.

A l’époque où l’on vante la fluidité et la continuité numérique, qui devrait être une caractéristique basique entre partenaires et des entreprises engagées dans une transformation numérique, voilà une splendide démonstration de re-création de silos et d’interfaces inutiles, bien visibles du client attentif (exigeant et un peu pinailleur je l’admets), qui nuisent à SON expérience.

Voilà une demi-mesure qui ne ME satisfait pas, une initiative qui dessert à MES yeux ses initiateurs, me laisse l’impression d’une ambition à la j’aimerai-bien-mais-j’ai-pas-les-moyens, mais aura au moins le mérite d’inspirer ce billet d’humeur.

Christian HOHMANN

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Production de masse de produits personnalisés

On prête aux « usines du futur » une capacité à produire de manière économiquement viable des produits personnalisés, répondant ainsi à la demande croissante de différentiation et personnalisation de la clientèle.

Longtemps réservé aux produits de luxe et à l’artisanat, la production de masse de produits personnalisés semblait relever d’un futur lointain. Or de telles usines à produire en masse des produits totalement personnalisés à des coûts raisonnables existent déjà : les entreprises proposant des livres photos.

La transition de la photo argentique (sur films négatifs) vers la photo numérique a eu raison de nombreux petits laboratoires locaux proposant le développement des pellicules et le tirage des photos. Cependant, en passant à la photographie numérique, les particuliers se sont vite rendu compte que les images digitales se consultent moins aisément, à moins de se donner la peine d’imprimer leurs images et de constituer des albums photos et… d’en supporter les coûts.

L’offre consistant à proposer des livres photos allège le travail personnel et propose des produits de qualité pour un prix raisonnable. Pour industrialiser cette activité et la pérenniser économiquement, il faut exploiter la masse des niches.

Longue traine

Exploiter la masse des niches

Les entreprises proposant des livres photos ont compris l’intérêt d’exploiter la masse des niches que représente l’ensemble des personnes prenant des photos numériques et la fraction non négligeable de personnes désireuses de pouvoir les montrer ensuite aussi aisément qu’un album photos à l’ancienne.

Il s’agit de produire en masse des produits personnalisés et uniques.

Cette nouvelle activité répond parfaitement à une demande souvent redoutée dans l’industrie ; proposer à prix acceptable et de manière économiquement viable des produits fortement personnalisés.

Personnalisation ; demande ancienne et nouveaux businesses

La demande de personnalisation des produits (et services) est ancienne, avec une accentuation lors du basculement de l’économie de pénurie vers l’économie d’abondance (les années 1970 en vieille Europe), période à partir de laquelle les besoins de base étaient couverts et les consommateurs à la recherche de produits à critères distinctifs dans une offre de plus en plus diversifiée.

L’industrie n’a répondu à cette demande que « mollement », d’abord parce que les moyens installés et la logique dominante étaient des héritages de l’ère de la production de masse, peu flexibles et axés sur des produits standardisés. La demande de personnalisation mettait en cause les modèles économiques d’alors et faute de moyens agiles aptes à être rentabilisés avec de petites séries très différentiées et peu ou pas répétitives, la viabilité était incertaine.

Personnalisation : le choix d’une combinaison particulière parmi celles offertes

Un certain degré de personnalisation a été proposé au travers de combinaisons de sous-ensembles et d’options prédéfinies. Un exemple bien connu est l’industrie automobile qui permet de choisir le type de moteur, sa puissance, le type de boite de vitesse, des options, des couleurs, etc.

D’autres secteurs d’activité se sont inspiré du principe combinatoire.

Exemples :

  • 2 couleurs x 2 tailles = 4 références de produit final
  • 3 couleurs x 3 tailles x 3 niveaux de finitions = 27 références de produit final
  • 4 choix de motorisation x 2 choix de boites de vitesse x 12 couleurs x 3 niveaux de finitions = 288 configurations de véhicule

Mais aussi vaste que le choix paraisse, ce n’est toujours qu’un choix limité à une combinaison particulière parmi toutes les combinaisons offertes. Le choix reste restreint et industriellement gérable, même si cela pose des problèmes en matière de prévisions des ventes, de logistique et de délais de réalisation.

Exemple de « personnalisation » sandwiches : le choix d’une combinaison particulière parmi toutes les combinaisons offertes

Le client prend en charge une part du travail

Le cas du livre photo est différent, le livre comporte les images du client et non pas celles issues d’un choix à faire dans une vaste bibliothèque d’images. Le livre en question doit rassembler les images sélectionnées par le client lui-même.

C’est là la vraie personnalisation ; le client détermine librement le contenu de son livre photo, avec quelques contraintes techniques mineures telles que le nombre de pages que le livre peut comporter, le placement des images, leur taille, etc. qui font que certains choix restent limités à des options : gabarits de placement des images dans la page, choix des typos pour les titres et légendes, choix du modèle de livre et sa finition…

Si cela est rendu possible, c’est que le client prépare lui-même sa « matière première » pour le fabricant du livre, qui ne fait que finaliser le travail préparé. Le coût de ce travail préparatoire est laissé au client et la « matière première » est dématérialisée. Ceci permet de transformer les données numériques préparées gratuitement par le client, transmises et brièvement stockées à coûts infinitésimal, en produit tangible.

Comme le stockage des données et leur traitement est relativement peu coûteux, les coûts augmentent essentiellement à partir du moment où le produit final se matérialise.

Ainsi, grâce aux progrès techniques et à l’accès des particuliers à l’informatique, ces fabricants peuvent exploiter de manière économiquement intéressante la masse des niches que représente les photographes désireux de feuilleter leurs œuvres, tout en offrant à chacun un produit unique et totalement personnalisé.

La production de livres photos personnalisés préfigure ce que pourrait être l’usine du futur, tout en étant déjà une réalité.


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